H.Ôtsuka, s’éloignant de G.Funakoshi, continue à élaborer son art en fusionnant le karaté et le jûjutsu. Certains groupes d’étudiants préfèrent sa démarche. Ils veulent essayer l’efficacité du karaté dans les exercices de combat, ce qui est interdit par G.Funakoshi et, lors de la séparation, ils choisissent de suivre H.Otsuka. C’est ainsi que l’école de Funakoshi se divise en deux. Le groupe qui suit H.Ôtsuka formera plus tard l’école Wadô-ryû. H.Ôtsuka rencontre un adepte de kendo nommé Y.Konishi qui suit une démarche parallèle et tente d’avancer dans la voie du karaté en y intégrant les acquis de sa pratique du kendo. Ils deviennent bientôt amis et leur collaboration continuera leur vie durant. Y.Konishi créera plus tard l’école de karaté Ryôbukai dont l’activité se perpétuera en gardant sa qualité, mais sans connaître une grande expansion.
C’est par l’intermédiaire de Y.Konishi que H.Ôtsuka rencontre en 1928 K.Mabuni qui vient d’arriver d’Okinawa. H.Ôtsuka lui expose ses problèmes concernant les kata qu’il a appris de Funakoshi et ses tentatives pour trouver des formes plus satisfaisantes de kata. Pour H.Ôtsuka qui n’a pas pu effectuer de voyage de recherche à Okinawa, le savoir étendu de Mabuni est un révélateur qui fait avancer sa réflexion sur les kata.
En 1934, il ouvre un dojo à Tokyo. A côté de son travail de médecine traditionnelle, il commence à enseigner le karaté dans son dojo et dans quelques clubs universitaires. En 1938 après l’attribution du titre de renshi (maître de troisième rang) par le Butoku-kai, il cesse d’exercer la médecine traditionnelle et se concentre sur le karaté. C’est alors qu’il adopte pour son école le nom de Wadô-ryû, suivant en cela la suggestion de ses élèves. Quatre ans plus tard, en pleine période de guerre, il obtient le titre de kyôshi (maître de deuxième rang). Mais bientôt la pratique du karaté diminue, puis disparaît sous le fracas des bombardements. Les jeunes partent au service militaire, puis au front. Les morts sont innombrables. A la fin de la guerre, il n’y a plus aucun dojo de karaté à Tokyo. C’est après 1946 que des étudiants recommencent peu à peu à pratiquer le karaté, réchauffant de leur passion juvénile l’atmosphère refroidie et morne de la défaite.
Au Japon, pendant les années qui suivent la guerre, le souci principal de la population reste de se nourrir, aussi les conditions matérielles de la pratique sont-elles plutôt misérables. L’entraînement prend souvent parmi les groupes d’étudiants une dureté sauvage. Il semble qu’ils subissent encore le mouvement d’inertie menant à la mort amorcée par la guerre; c’est comme s’ils tentaient d’oublier les blessures de la guerre en se plongeant profondément dans la pratique de l’art de combat. Pour les étudiants d’après guerre, s’imposer un entraînement d’une dureté démesurée, c’était en un certain sens faire le deuil de leurs camarades morts. Pour ceux qui avaient été sûrs de mourir à la guerre, il fallait passer par un entraînement suffisamment dur pour effectuer leur propre deuil. Après la guerre qui a si profondément frappé le Japon, les écoles de karaté reprennent donc d’abord dans les clubs universitaires. H.Ôtsuka recommence son enseignement dans plusieurs universités.
Il meurt en janvier 1982 à l’âge de 90 ans. Vers le début des années 50 des étudiants organisent petit à petit des rencontres universitaire de combats. La notion de contrôle y est presque absente au début, mais des règles s’instaurent progressivement. C’est ce qui a fourni plus tard la base de la formation des compétitions sportives de karaté.
Sources : Histoire du Karaté par K.TOKITSU.